Ma mère m’a portée...

Ma mère m’a portée dans un ventre

jeune et ferme que je ne

reconnais pas

 

j’oublie aussi vite

que j’assimile

on dit tu n’écoutes pas

 

tout fond comme un buvard

sur ma langue

je regarde le matin

s’embourber dans un temps

sans temps

 

une minute et la lune

s’est déjà levée

je me remets au lit avec le soleil

fatigué de briller pour d’autres

 

Je m’enfonce

dans un sommeil trop profond

d’où les rêves ne me reviennent

que par brides éphémères

 

mon corps rejoint le sien

au fond des glaces

des galets friables

plein les poches

 

nous revenons

lourdes et trempées

à la surface de l’aube

 

nous ne sommes pas faites

pour la disparition

Référence bibliographique

Charlotte Francoeur, « Ma mère m’a portée… », Adieu les crevettes, Le Noroît, 2023, p. 19-20.

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