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Ce n’est pas si terrible
un jour vide
d’abord
et le plus soigneusement du monde
je fais l’expérience du rien
puis j’enfile autour de mes poignets
Tu dessinais des baisers.
Le paysage exigeait des statues.
Tu balayais les ombres.
Tu m’as expliqué comment le fleuve,
du coin de l’œil,
apparaît et disparaît,
s’ouvre et se ferme,
Avec toi j'entre dans le langage comme dans une maison. Je compose un cheval de lettres, un enfant sur la terre. Comme si je courais tous les dangers : cueillir une fleur dans l'incompréhensible, aimer le mot plus que moi-même.
juste là-bas
où les rivières se croisent
les gens se sont toujours rencontrés
500 ans c’est rien
ce lieu est trop profond
cette terre est une histoire vivante
nous sommes honorés d’y marcher
La nuit je parle trois langues et demie
le français l’anglais le portuguais
et le biscuit chinois
(je mange aussi le papier dans le biscuit pour que le message passe)
la nuit porte conseil
J’écris une lettre
au pays de l’enfance
l’odeur du parent aimé
l’accent du village qu’on ne perd jamais
je marche avec une aube pointue
une allure de chien errant traversant l’autoroute
Ma mère m’a portée dans un ventre
jeune et ferme que je ne
reconnais pas
j’oublie aussi vite
que j’assimile
on dit tu n’écoutes pas
tout fond comme un buvard
La faim me réclame, la faim incommensurable,
la faim excitée par le flottement continu
des étoiles. Elle vient, ma faim, empourprer
mes veines afin de dessiner le bonheur
après la tristesse. Mais le bonheur comme
dans la chambre
porte entrebâillée
un courant d’air
nous rassemblons
nos cailloux
nos vêtements
nos incarnations
— dans nos poches
des miettes de pain
Retrouve-moi à Montréal
mais ne viens pas sans prévenir
ne viens pas découvrir ma tête rasée
les encres, le métal
que j’ai calqués aux femmes-hiver
retrouve-moi mais ne regarde pas ce que j’ai semé
Dans un bar bondé à Belfast,
une voix de campagne, fumée bredouillante,
plonge dans mes oreilles.
Hé ben. T'es pas mal costaude.
Je me suis dit qu'il croyait
me faire un compliment.
Tu es comme toutes ces mères qui ont toujours
protégé leurs petits, les ont nourris, léchés,
éduqués, dévorés devant les prédateurs.
Tu voudrais ressusciter ta lignée d'ancêtres
Je stationne mes Dinky Toys dans
le hangar sous le lit et je m'assois
à la table.
Je mange comme un ange
les ailes en bavettes sur les
genoux.
Ma mère me regarde
ses yeux en lunettes sur son
Il me semble que la poésie agit
à partir du corps puis de la tête
de la mémoire des bandes dessinées
ou de l’eau salée avalée
en sautant dans la rivière de mon enfance
il me semble que ça parle
L'amour,
substantif,
très substantiel,
nom singulier,
genre ni féminin ni masculin,
genre désarmé.
Au pluriel
les amours désarmé(e)s.
La peur,
Quelqu'un finit toujours par me dire
T'es pas rendue trop grande
pour ça ?
Comme s'il y avait un âge limite pour
jouer
niaiser
ne rien faire
flashbacks
à perpétuité
la mémoire est une corde
de bois d'allumage
la prison d'origine
l'armure d'écorce
je me pars une collection
de barreaux
sciés
I
Le peintre suit le pinceau abstrait de la neige
ses leçons de regard
la lente floraison
c'est le new guy
il vient des vagues de blé
il n'a pas hésité
à traverser le pays
arriver au début
du chemin d'eau
pour que sa femme
rentre au port
ma peau ne m'appartient -
je n'écrirai pas
dans son gras je vieillirai
d'un jour je respecterai
les consignes je
m'achèterai de la crème à mains pour pouvoir dire à ma
À la hauteur des vents
hisser les poitrails
tout sauvegarder
le rire blanc
et le soleil rouge et natal
ébène ebony blues
chant toujours rage
Et c'est l'automne :
saison du cloaque et des ramassis,
débarrassé de ce projecteur nazi
qu'est le soleil des autres,
je me suis pourtant défendu de collaborer,
Cette vieille femme
Au pas hésitant vers l'amour
Devient humaine,
Mais la Muse désapprouve.
Cette chair vénérable
Récolte tendresse et pardon
De la main charitable
Dans un monde parallèle vous ne m’avez pas trahie
Les moments ont continué de se traduire
Chaque page et ses correspondances
Dans ce monde il est resté des lits
De mon côté Les antipodes n’ont pas exercé leur force
Les limaces vivent en troupeau
Dans une traînée de vie
Le geste lâche et plat
Elles mangent le quotidien
D’un état de peu à peu
Sans début ni faim
Leurs cours sans jardins
Nos os puent l'humidité
des dizaines de petits vers blancs
circulent dans nos foies
des vers très vigoureux
qui n'hésiteraient pas à grimper
le long des jambes du promeneur
Cancer.
C'est le pire mot de tout le vocabulaire.
Un mot qu'on apprend sans le vouloir.
On se réveille un jour
mes parents cassent parfois des verres
ils sont tous les deux d'humeur fragile
moi je ne casse pas grand-chose
comme la vaisselle
qui prend les marques du temps
ma gorge se fissure parfois
Comme je déchire
Le dernier poème que j’ai écrit
À propos de toi
je sais
que je n’en écrirai plus
sur ce banal sujet
Vaguelettes le huard, la chaufferette qui r’semble à un toaster
comme un début d’fin d’lac par une vitre trop épaisse
l’impression d’un temps qui passe comme un pédalo
quand j’veux ramer tu-seul pour ervoir les quenouilles
Je me souviens du futur, je me souviens du drame entier de
la boue, du désordre, de la boîte de nourriture sur le pas de
ma porte.
Je me souviens des arbres d'une autre vie, du manuscrit plein
Les étoiles amputées par les lumières de la ville
nous ne voyons plus le même ciel que nos ancêtres
nos constellations sont modernes et consuméristes
les bras étoilés tendus d'espérances
Je t'écris du plexus solaire, exactement -
puis de la gorge, comme s'il était presque midi.
Ma tête d'aujourd'hui - grands pins noirs,
Cage d'oiseau - La fille maigre
À quelques années de distance,
le coeur de la jeune fille
et les os du jeune homme.
Dieux exilés dans un parc d'effroi
Tu verras l'effilochement le cassement
au clair de lune
un pont relie
les pays des voyageurs
je fais partie d'un cortège
long de plusieurs exils
lasse de ne pouvoir renaître
je prends le chemin à rebours
Coeur égrené,
je n'aurai jamais un nom
J'ai passé
la main sur les années
au ras de l'ombre,
minutes
brûlées
au crépuscule.
Pour cela,
je m'assieds parmi des gouttes
dans l'être amoindri
du silence.
Ouvre les tiroirs les plus secrets de ta mémoire
tu baignes dans la langue de ton enfance.
une voix douce et familière
chantonne cette berceuse sépharade
« En la casa hay una reja
cette journée est beaucoup trop universelle pour moi
cette histoire me rend modeste
je ne peux pas sortir du lit dans ces conditions
je ne peux pas ouvrir les yeux dans ces conditions
for all
that struck the earth
no matter if not bruised or spiked with stubble
Malangas
Échalotes
Mirlitons
Aubergines
Déshospitalités
Sortir de toute urgence
ramasser
À Manolo Pesantes
Seulement pour déranger, seulement pour ça,
pratiquer une douche au compte-gouttes,
fatiguer la fatigue, désespérer les pleurs…
une couche dorée sous un lit
de nuages gris
la lourdeur se divise en étages
saute un peu plus haut
déchire les montagnes
m’aveugle
le soleil
descendre la vitre
dans leurs
yeux
le même
regard
incendiaire.
leurs pupilles
brûlent
et fument
comme
les dernières
C’est loin
Je l’entends souvent
T’en fais de la route
Ça te prend combien de temps
Je comprends
Quand tu pars de l’autre province
Quand tu pars de la capitale
le temps est terne
et je suis comme le temps
en continuum avec l’espace et je me fais
tatouer une hirondelle dans le front
pour chaque tour du monde que je fais
sur notre beau vieux divan brun
il faut le dire ta dernière lettre elle se pesait en
TONNES
Elle écrasait tout dans son grand rectangle noir imprimé :
Et puis quoi d’autre sinon un milliard de routes de nuit éclairées par le cul d’une luciole priée espérée attendue ?
Moi, on ne m’a jamais appris à faire silence
tandis que les cicatrices
de nos feuilles d’automne
sillonnent la neige frugale
je rêve l’hiver
je rêve l’hiver de toi
que c’est dur de narrer le futur
dans la fragilité du présent