Voir tous les thèmes et registres
J’ai longtemps cru que les bateaux voguaient par deux
mais il en est qui dorment seuls
dans le fond des estuaires
Ce n’est ni le froid ni la rouille qui les tourmentent
Aujourd’hui le printemps s’est mêlé à l’hiver
Tout fond
L’hiver n’a pas dit son dernier mot
Un ancien imite le vent
je pense aux arbres et à leur ancrage
je pense à ma mère juchée bancale dans la cuisine
je pense aux autobus jaunes
dans la cour de récré
cordés en ordre pédagogique
les enfants demandent une consolation
pour le premier arrachement
du lait chaud ou ta peau
mousse mémoire de leurs joies
tu leur offres une attention – t’alignes
vers ton devenir animal
lorsque je te dessine
je se dépose
emploie la cuisine le salon
pour ce que je voudrais multiplier
tu portes habits d'étincelles
sur la pointe des pieds
La déferlante du deuil ne se relâche pas. La stopper. Revisiter la vie et
mon regard sur elle. M'enthousiasmer pour elle. L'occuper jusque dans
Tu es comme toutes ces mères qui ont toujours
protégé leurs petits, les ont nourris, léchés,
éduqués, dévorés devant les prédateurs.
Tu voudrais ressusciter ta lignée d'ancêtres
Il me semble que la poésie agit
à partir du corps puis de la tête
de la mémoire des bandes dessinées
ou de l’eau salée avalée
en sautant dans la rivière de mon enfance
il me semble que ça parle
J’habite un cri de terre aux racines de feu
Enfouies sur les rochers de solitudes
J’ai creusé lentement les varechs terribles
D’une amère saison de pluie
Comme au coeur du crabe la soif d’étreindre
tous les pays blessés
ont une place sous ma peau
j’ouvre mes yeux
l’espoir est un café rouge
dans mes matins fêlés
je marche
mes pas dessinent mon néant
Quelqu'un finit toujours par me dire
T'es pas rendue trop grande
pour ça ?
Comme s'il y avait un âge limite pour
jouer
niaiser
ne rien faire
moi mon allure est plus régulière que je ne le suis.
c'est le new guy
il vient des vagues de blé
il n'a pas hésité
à traverser le pays
arriver au début
du chemin d'eau
pour que sa femme
rentre au port
Tu me donneras l'eau ce jour ;
Il faut que coulent les galets
Qui obstruent les sentiers ;
Ce soir,
Je rentrerai,
Dans la case des génies
Tête devant, et boire
La sève nourricière ;
À la hauteur des vents
hisser les poitrails
tout sauvegarder
le rire blanc
et le soleil rouge et natal
ébène ebony blues
chant toujours rage
il n'y a plus de soleils couchants
La mer n'évacue pas, ne vide pas les regards. La mer nous
regarde dans les yeux et c'est le signe d'un combat.
La mer ne nous égare pas, nous ne sommes jamais perdus
Seul, je regarde la troupe qui s'approche couteaux
entre les dents. Elle marche, dérisoire
comme le boeuf à la cape dans des rêves qui
s'essoufflent sur le sable aux sabots. On poignarde,
Dans un dictionnaire, il est écrit que
«l'amour est un mouvement,
une affection, de la tendresse».
Je m'efforce de comprendre comment ça peut
disparaître
et je tourne en boucle dans ma tête
Cette vieille femme
Au pas hésitant vers l'amour
Devient humaine,
Mais la Muse désapprouve.
Cette chair vénérable
Récolte tendresse et pardon
De la main charitable
Les limaces vivent en troupeau
Dans une traînée de vie
Le geste lâche et plat
Elles mangent le quotidien
D’un état de peu à peu
Sans début ni faim
Leurs cours sans jardins
Nos os puent l'humidité
des dizaines de petits vers blancs
circulent dans nos foies
des vers très vigoureux
qui n'hésiteraient pas à grimper
le long des jambes du promeneur
mes parents cassent parfois des verres
ils sont tous les deux d'humeur fragile
moi je ne casse pas grand-chose
comme la vaisselle
qui prend les marques du temps
ma gorge se fissure parfois
Comme je déchire
Le dernier poème que j’ai écrit
À propos de toi
je sais
que je n’en écrirai plus
sur ce banal sujet
Je serai femme
Tu resteras homme
Je suis revenu des grands jardins
des chemins de sel
aux horizons transparents
Ici-bas j’ai hurlé
dressé le songe sous des carapaces d’or
Le cristal a gémi dans ma poitrine
Les eaux de nuit parlent en rêvant, buveuses d’étoiles, luisantes d’oracles
L’eau nocturne entre par les portes
sans frapper ni les ouvrir
sans demander la permission
Les étoiles amputées par les lumières de la ville
nous ne voyons plus le même ciel que nos ancêtres
nos constellations sont modernes et consuméristes
les bras étoilés tendus d'espérances
Je t'écris du plexus solaire, exactement -
puis de la gorge, comme s'il était presque midi.
Ma tête d'aujourd'hui - grands pins noirs,
jappements d'outardes, au-dessus de toi.
Personne n'écoute le match
Cage d'oiseau - La fille maigre
À quelques années de distance,
le coeur de la jeune fille
et les os du jeune homme.
Dieux exilés dans un parc d'effroi
un os ou un poème,
Je suis souvent seul à l'avant
Dans le siège indésiré des indésirables
Ma solitude est confortable
Je scanne des paysages
Mon regard est une vigie
Sans pesanteur et légère, sans toucher terre
comme écume éparpillée dans la brise,
mon âme est en voyage.
Comme les saisons du temps
entre le feu et la nuit
par les chemins et les jours.
Légèreté, légèreté, je t'appelle
Je te donne en secret un nom d'oiseau
Je te nourrirai dans ma paume avec le meilleur de moi-
même
au clair de lune
un pont relie
les pays des voyageurs
je fais partie d'un cortège
long de plusieurs exils
lasse de ne pouvoir renaître
je prends le chemin à rebours
pour capter le ciel
Ses hanches ondulaient au rythme des tambours. La déesse noire est morte avant qu'on puisse l'oublier. Pressées par la foule sur la grande avenue, ma grand-mère et moi attendons son cortège.
la parole précise n’a pas de langue
Coeur égrené,
je n'aurai jamais un nom
J'ai passé
la main sur les années
au ras de l'ombre,
minutes
brûlées
au crépuscule.
Pour cela,
je m'assieds parmi des gouttes
dans l'être amoindri
du silence.
Ouvre les tiroirs les plus secrets de ta mémoire
tu baignes dans la langue de ton enfance.
une voix douce et familière
chantonne cette berceuse sépharade
« En la casa hay una reja
ce n'était pas ma terre que je visitais
même pas celle de mon père.
et pourtant -
c'était la première fois que je voyais
un regard de reconnaissance chez les autres
sous la douche
tenir dans l’eau
tenir le vide
au cœur de quoi la détresse
la voix s’égrène
tout bas
remue quelque désordre lointain
ta détresse de quoi
cela déchire rassemble
au même lieu
et dans le même temps
savoir que les mots
L’arbre devant la maison a perdu toutes ses feuilles. Elles ont disparu du jour au lendemain. Je ne me souviens pas de les avoir ratissées.
on se raconte nos destinées
toi, qui navigues les eaux salées
tu n’as pas vingt printemps
Saigon s’affaisse dans la noirceur
je me suis engagée
à au moins être là
présente, ouverte
témoigner de l’expérience
écrire le paradoxe
mais ça
c’était avant
quand tout avait un sens
encore reconnaissable
II y a un système aux États-Unis
Permettant aux jeunes athlètes
Qui ne finissent pas le high school
Avec des assez bonnes notes pour être admis à l’université
De faire une année de plus
Ignores-tu que la réalité est composée de zones sensibles ?
Vois-tu la montagne
Les oiseaux qui en sortent par division
Étrange production soulevée par l’énergie qui la parcourt
Les maisons et les machines
l’avenir voit rouge
nous repartons vers nos terres
pas à pas
tachés du sang de nos ancêtres
les pas perdus s’évadent du feu sacré
c’est là que les jeunes reforment le cercle
pour Miriam
sur les rives de l’Outaouais
bercées par le lait chaud au miel lorsque malades
nous avons grandi
loin des rabrouages inutiles
Je cherche l’équilibre
le quart de ton
sa place
si petite soit-elle
entre les notes
une fissure à la Cohen
pour faire passer la lumière
Et puis quoi d’autre sinon un milliard de routes de nuit éclairées par le cul d’une luciole priée espérée attendue ?
Moi, on ne m’a jamais appris à faire silence
moi, très jeune, mon pays m’a dit :