Pour dormir ou ne pas dormir jour et nuit
Je pose ma tête sur les genoux de Jany.
L’ombre la lumière le jour la nuit
Sont sous ma tête les genoux de Jany.
Le printemps l’hiver jour et nuit
Je les pose avec ma tête sur les genoux de Jany.
La fauvette blonde est pour moi Jany
La hulotte inaperçue est pour moi Jany.
L’été l’automne jour et nuit c’est Jany
Dix années puis même toute ma vie c’est Jany.
Les saisons les oiseaux les floraisons varient
La neige le beau temps l’onde et le vin varient.
Je n’ai pas le janvier le juillet qui varie
Je n’ai pas la neige le beau temps la vie qui varie.
S’il y a sans saisons sans neige et vent sans jour et nuit
S’il y a l’hôtellerie nommée outre-vie
On m’y verra dormir ou ne pas dormir
On m’y verra mourir ou ne pas mourir
Sur les genoux de Jany.
Armand Robin, « Les genoux de Jany », Ma vie sans moi, Paris, Gallimard/Poésie, 1970.