apprendre à reconnaître...

apprendre à reconnaître les ondulations du racisme en même temps qu'à ouvrir un berlingot de lait dans mon école de pauvres : les faces blanches sur le côté de la pinte sont des enfants disparus.

 

des vies mirages

aux prénoms aveugles

 

je voudrais y gribouiller les lisières

mon pays abandonné

les contours mon cousin perdu

les frontières mon papi souffrant

mi abuelita sa tasse de thé au plancher

y gribouiller un peu de moi

d'avant la cavale

 

je ne sais déjà plus

à quoi ressemblent les vagues mon cousin

les fuites mon papi jour de pluie

la folie abuelita en prière 

les fugues mon pays ailleurs

qu'ici soubresauts mon école de pauvres

le lait ne passe plus

 

je ne sais pas ouvrir mon berlingot ça coule tout le temps

partout des larmes de lait sur les visages disparus

des larmes blanches sur ma peau

d'immigrante à deux faces 

 

mon corps n'a plus le temps d'y penser, à mon école de pauvres la cloche a sonné mon mal de ventre parce que je ne sais pas bien lacer mes souliers. on ne les attache pas pareil en français.

 

comme les autres enfants je chenille en rang

en intermittence la grammaire le lait les maths 

secousses et hoquets 

oscillations perdues 

mes souvenirs sursautent 

 

je trébuche

une flaque sur le plancher noir

sable mouvant goutte de lait dans l’océan  

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