Ni connu ni cru

Ni connu ni cru

Ni compris ni cherché

Oui

C’est elle

Elle

Elle ne m’a jamais écrit

Elle ne m’a jamais bu

Jamais voulu

Jamais su ému

Elle

C’est elle

Oui

Qui m’a dit et alors

Qui m’a dit et après qu’importe allons signe

Elle

Elle à qui les mots

Elle à qui les gestes les je te jure

Et la vérité du regard

Ne sont qu’alibis

Ne sont que brouillamini

Ne sont que de trop

Elle

Qui était là butée

Qui était là sourde

Qui était là ailleurs

C’est elle

Oui

Que j’ai connue en mon désespoir solitaire

Que j’ai cherchée en ma noire mélancolie

Que j’ai crue en mâchant le silence des peurs

Et bue au calice du désir de communiquer

Et lue au désert de la force d’être deux

Et au besoin de se vouloir faire

Elle

Oui

C’est bien elle

Terre dite amie de ma mère terre

C’est bien elle

Qui ce matin dans le journal

M’a traité de tous les noms

M’a lapidé de ses crachats polis

Référence bibliographique

Yambo Ouologem, « Ni connu ni cru », Poésie I, Paris, Éditions Saint Germain-des-prés.

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