Le sage visage dans le puits
les plis
l’ovale à bajoues,
le nez qui renifle déjà du côté noir de Dieu
entre les chocs, le nez du sage
ressemble à un crapaud placide
sur le plat du visage
et il sourit,
il sourit le nez, le crapaud,
et la bouche grelotte,
fait des efforts pour crier, non, prier,
l’un et l’autre, pour marquer le coup
contre tout le noir du visage,
du puits, du sage, du trou consterné.
Saint ! Saint ! Il sainte !
Il sue la sauce admirable.
Il rend les scories du devoir
accompli selon
un bon plan d’existence.
Toute sa vie il a aimé.
Il a aimé des porcs, des femmes et des masses
de métal animées, noirs bolides.
Il a roulé dans les rues chaudes, évitant
les chats et les enfants.
Délicatesse ! Attention à autrui ! Un militaire
n’aurait pas géré mieux son droit de tuer.
Bon soldat de la rue ! Apôtre de l’asphalte !
Vie dans le siècle !
Et maintenant,
il n’est plus que son visage qui flotte
comme la tête du Baptiste
ou la défroque d’Ophélie,
flotte parmi les pelures
tombées du Temps. Un tas
entre les tas. L’agonie
penche sur lui
son sourire de menthe.
Il va mourir, il est serein.
Serein ! Serein !
Il est énormément serein.
Il se souvient de ses familles,
de ses voitures,
de son amour.
Il est content.
Tremblante, ô combien
stimulante
gélatine !
André Brochu, « Protrait en profondeur », Les jours à vif, Éditions Trois, 2004.