Sonnet

À pas lents et tardifs tout seul je me promène,

Et mesure en rêvant les plus sauvages lieux ;

Et, pour n’être aperçu, je choisis de mes yeux

Les endroits non frayés d’aucune trace humaine.

Je n’ai que ce rempart pour défendre ma peine,

Et cacher mon désir aux esprits curieux,

Qui, voyant par dehors mes soupirs furieux,

Jugent combien dedans ma flamme est inhumaine.

Il n’y a désormais ni rivière ni bois,

Plaine, mont ou rocher, qui n’ait su par ma voix,

La trempe de ma vie à toute autre celée.

Mais j’ai beau me cacher, je ne puis me sauver

En désert si sauvage ou si basse vallée

Qu’amour ne me découvre et me vienne trouver.

Référence bibliographique

Desportes, Philippe,  « Sonnet », Œuvres de Philippe Desportes, Paris, Delahays, 1858.

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