D’une voix


Les digues ont fini par lâcher
et je suis née aux débordements.
Dissoute
je baignais dans une mer d’eaux plurielles.
C’était croire en la couleur
croire en l’atmosphère
croire en l’invisible
croire en la plasticité
de nos représentations.

Depuis

je prétends
détenir une part du cosmos
en mes fêlures.

Je possède
en moi une infinité d’êtres
possibles grâce à toutes ces langues que j’abrite
et qui ne racontent pas toutes la même chose de moi.

Je passe
d’un personnage à un autre je choisis
qui va se présenter à l’autre
quel tempérament sera véhiculé
par l’intention détenue d’une langue.

Je prends
le soin de recueillir les crachats
et en faire de la glue
échafauder ce qui fera de mon bi-linguisme
un outil d’émancipation.

La vengeance est à l’origine de ma poésie
et de mon désir de défendre
celles et ceux qui n’ont pas les mots pour le dire.

Référence bibliographique

Stéphanie Quérité, « D'une voix » (extrait), Vers le Nord, La boucherie littéraire, 2023.

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