Biographie
Anthony Lacroix est né en 1991 et a grandi dans le village de Saint-Claude dans les Cantons de l'Est. Il a fait paraître des textes dans de nombreuses revues et expositions en plus d'avoir publié quatre livres, dont le plus récent est Proust au gym (2024) aux éditions de Ta Mère. Il dirige présentement les éditions Fond’tonne, travaille comme libraire, corrige beaucoup de copies comme chargé de cours en poésie à l'UQAC, co-coordonne le festival de poésie DRETTE LÀ et prépare une thèse de doctorat subventionnée par le CRSH sur « les fictions refuges » sous la direction de Martin Robitaille (UQAR).
Entrevue
Je me souviens avoir lu un poème de Nelligan et quelques prières (ça compte non ?) au primaire, mais le plus de mes lectures de poésie à l’école a été fait quand nous devions associer les différentes figures de style existantes à des vers de Verlaine, de Rimbaud et de Baudelaire. Seulement, je me souviens que mon prof de secondaire 4 récitait souvent le poème « Hymne à la Baudelaire » en faisant des gestes exagérés partout dans la classe (se mettre à genoux, monter sur les bureaux, varier les intonations). Je me souviens aussi de Frank Poule qui faisait un peu la même chose dans les rues de Sherbrooke avec son poème « Jean Bourgeois ». C’est durant cette période que je me suis rendu compte que la poésie pouvait être tellement plus qu’un exercice de français en silence et la même année j’ai décidé de m’acheter mon recueil avec mon argent de poche, c’était Je voudrais crever de Boris Vian.
Je peux bien faire des performances éclatées.
J’ai commencé très tard à écrire de la poésie. En fait, étonnement, j’ai commencé par le roman et la nouvelle parce que c’est ce que je faisais avec mes ami·e·s en secondaire 4 (j’étais très mauvais). Puis, je me suis tranquillement réorienté vers le slam et la scène de poésie pour avoir un truc à moi. Comme je n’avais aucun talent en dessin ni en musique (je n’ai aucun sens du rythme), mais que je voulais vraiment être un artiste, parce que ça me semblait être les personnes les plus cool de l’école (ou du moins celles en qui je me reconnaissais le mieux), alors j’ai travaillé vraiment très fort pour que le slam et la poésie deviennent mes voies d’expressions à moi. On ne parlait pas de poésie à mon école, on n’encourageait pas vraiment ça. J’aurais aimé qu’un organisme comme Les voix de la poésie existe à l’époque. L’an dernier, deux poètes de l’organisme y sont allé·e·s d’ailleurs.
Maintenant, après dix ans de publications à gauche et à droite et de nombreuses prestations, je commence à penser que certains de mes textes peuvent être bons et intéressants. Cependant, n’ayant jamais eu un talent naturel pour quoi que ce soit, mon sentiment d’imposteur est très fort et m’empêche de me considérer comme un « poète ». À mes yeux, je n’ai pas encore le talent et l’expérience de quelqu’un comme Élise Turcotte, Jean-Paul Daoust, Catherine Cormier Larose, Marie-Andrée Gill, alors je ne peux pas dire que je fais le même métier qu’eux et elles, ça me semble irrespectueux.
Pour moi un ou une poète c’est une personne qui dit beaucoup en très peu de mots.
J’aime beaucoup les poèmes qui racontent des histoires en partant des fondements mêmes de la vie quotidienne. Entre le poème lyrique et le monologue narratif, mes poèmes sont toujours de longue épopée au sujet d’un événement, important ou non, qui me soit arrivé. Pour moi, le langage est mon pouvoir magique et il serait niaiseux de ne pas m’en servir si j’en ai l’occasion. On dit aussi de ma poésie qu’elle est pleine de référents mélangés, que ce soit des théoriciens obscurs ou de la culture populaire. C’est possible, on est ce qu’on consomme après tout.
Il y en a tellement !
Je crois que mon choix s’arrêterait sur « Neige » de Nathalie Watteyne.
On parle si peu du travail de cette poète, qui est pourtant d’une grandeur et d’une justesse incroyable.
Quand j’ai des doutes sur mes écrits ou ma vision de la poésie, je relis le travail de Watteyne pour me sentir mieux.
Son enseignement de la poésie est une sorte de « lieu refuge » pour moi.
Aussi bien connaître un de ses poèmes par cœur.