CHOIX DU PUBLIC
Voir tous les thèmes et registres
et puis t’aimes pas les mots tu les connais pas souvent tu
sais pas ce qu’ils veulent dire y’a tout un genre de mots
que tu veux pas entendre ou dire les mots à trois syllabes
Ton vœu, offre-le
et je ferai avec toi le chemin.
Nul nom, nul visage
ne répond à cette invitation.
Le chemin s’enfonce dans l’improbable,
emportant avec lui tout l’ici.
Ils n’ont pas su regarder ils ont laissé
Vieillir le temps
Le dernier miracle se balance
À la poutre du garage
C’est toujours la même voix
Perdue la même voix de couteaux qui appelle
La première journée de l’amour est
inconcevablement abrupte ; entièrement faite
de choses arrachées -
- soudain et haut ;
et du jour qui s’élance
en travers de son axe.
je voulais te dire
mon visage manque
d’un tas de choses
qui t’appartiennent
*
à qui le nez
qui les yeux
les oreilles
Les peines d’amour sont des mines à ciel ouvert. Je me réveille à quatre heures quarante du matin pour écrire ça. Je me réveille devant mon assiette, je me réveille en marchant, je me réveille dans l’autobus.
viens on va aller se promener
je vais te pointer tous les endroits où j’aurais voulu être du temps
que toi tu y étais
ça fera des tracés, une carte, notre Lonely Planet personnel
Ma terre je la prendrai dans ma main
je la soignerai
avec un pan
ma jupe
essuiera ses larmes noires
mes cheveux ses joues creuses
je la bercerai en ses tremblements
je ne dors plus
J’ai donné des sous aux mendiants
mais les oreilles, les narines, les poumons
les yeux et la bouche de l’enfant
ouverts très grands
je ne les ai pas vus
les poèmes
je les ai tus
Bleue était la neige
comme la ville et les mains qui échappent
tant et tant de rires
pour toi j’aurais voulu parler
toute la nuit
que tombe et retombe la neige
sans dire au revoir jamais
Les enfants courent partout. On dirait des morts vivants dans la fraîcheur de l’herbe. Des groupes de bicyclettes passent sur Notre-Dame. On marche au beat des gyrophares. Je porte la couverture de laine sur laquelle on regarde les feux.
Tu es capable de tuer, même un être que tu aimes, on décide parfois de tuer ce qu’on aime. Ça s’est infiltré peu à peu dans ton cerveau, il hurlait, ton chat, il ne cessait pas de hurler, et tu n’as plus voulu l’entendre.
Les toilettes chimiques de Sani Mobile
occupent le coin à l’entrée de l’ensemble résidentiel
il y en a de multiples couleurs
pour autant d’états d’âme
un état d’âme peut aussi être en opposition
je ne vous parle pas de moi
qui peut croire que sa vie
intéresse vraiment d’autres vies ?
je vous parle des autres vies
d’une vie autre que la mienne
Sur la rue Sainte-Agathe
pas de chiens
des statuettes victoriennes, des marguerites
une maison orange et bleue, des serviettes roses sur le balcon
un homme aux cheveux blancs à l'autre bout du paysage
Aujourd’hui j’ai vu
comment meurt une ville
et j’ai été abandonnée
et je suis partie
et de rien
et je reviens d’un long voyage
mais par où commencer
par où
je commence par la mort
En novembre, un nouvel incendie a ravagé l’usine des vêtements de l’ouest.
Les neuf étages de l’enfer se sont écrasés sur les ouvriers du pays des terres inondées.
m : salut
l : salut
m : c’est ta bête
l : je sais
m : ça va?
l : ça va
l : toi?
m : ça va
m : ça fait longtemps
le soleil rince la première herbe
du dégel
tes mains pèsent
à l’endroit du cœur
à la place des neiges
sont légères
tes mains
si je ne touche pas les lignes du trottoir
si je me rends au troisième lampadaire sans
m’arrêter de courir
tout va bien aller
ça n’existe pas c’est dans ma tête
je n’arrive pas à faire
comme dans les livres arlequins
parce qu’il y avait tes chansons
qui berçaient les cadavres
tqs dans le noir
le vent joue avec moi comme il parle aux feuilles
tous les jours je me dirige vers le jardin de la gare je songe à
l’énigme de mes gestes pense oui mais je dis non un court-cir-
le gros monde veut me vendre une église
des habits neufs
de beaux chapeaux
le gros monde veut me border
de fleurs de lampadaires
de taxes foncières
Je choisis les nœuds
dans ma gorge
le risque peut bien en exciter d'autres que moi
plus courageux que moi
plus capables que moi
de chevaucher les menaces
de foudre
L’instinct maternel n’est pas
particulièrement développé chez les Reptiles.
Archie Carr, Les Reptiles, p.132
plus grands que nos corps
nous ne dormons plus
qu'à la verticale
quand la nuit se referme
sur nos peaux en état d'alarme
nous pratiquons des entailles
je t’écris en retard sur la vérité
les feuilles mortes c’est le temps
qu’aura mis la noirceur pour sécher
dans l’œil percé du cœur ce corps
étranger qui nous regarde
dormir pareils aux arbres
quand les cargos de sel
déverseront la rue Clark
dans ses caniveaux
je n’aurai plus raison
de rester là
dans l’embrasure de la porte
où plus personne ne s’embrasse
désormais
Je suis là présent un tremblement de terre,
mais il faut ajouter des orages,
quelque chose qui tient du mortel sacré,
à moins de dire tabula rasa
et d’immenses agitations de gamines,
tu descends des bières dans un bar de la rue
mont-royal
quelques parties de billard, des copains
on me prend cute
pour ici
ou pour emporter
on me prend
par la main
en me disant
c’est incroyable
Je m’enfoncerai dans les trous de la plaine
dans la tourbe où s’encaquent les errances effrayées des bisons
meuglant la découverte limitrophe de l’immense pays azuré.
Il y a des jours où je revois Sudbury
dans l’asphalte craqué des rues de Saint-Boniface.
La mémoire s’écoule comme la noirceur de la ville où j’ai grandi
Entre Ottawa pis Montréal,
entre la métropole pis la capitale,
entre des 9 à 5 comme des cercueils,
avec les foremen qui t’ont à l’œil,
entre les papiers du bien-être
pis leur formule mal de tête,
Cher Martin,
La nuit ne porte pas conseil
mais conflit
confusion
et miasme
(pour Jean Marc et Brigitte)
Je me réveille au son d’une pelle qui gratte la
neige.
Je me réveille au son de cloches qui sonnent contre
les fenêtres endormies.
Avant que le vent ne défeuille la vallée
je remonte tous les jours dans mon arbre
car l'odyssée tire à sa fin
à bord de mon vaisseau rouge
du haut de mon vieux pin
j'ai repéré la Croix du Sud
Ma grand-mère a murmuré :
Ton grand-père est vieux comme le chemin.
Seul dans sa chambre,
il lit le journal.
Je voudrais le bercer,
petit corps
Je ne trouve pas toujours
les phrases
pour décrire la lumière
accrochée au rideau de ma chambre
ou les notes d’une chanson
dans mon oreille
Alors je lis des poèmes
avec des images
Il y a les larmes des folles tristesses
et des peines minuscules
celles de la colère
plus pointues que des couteaux
plantés dans la poitrine
les larmes d’impuissance
si on me punit
Je ferme les yeux
Un rayon de soleil
Pénètre mes paupières
Infrarouge
Un filet de sang
Fait son chemin
Hors de moi
Chaque fois
Dans la cuisine
ma mère recousait des ailes
rapiéçait des membres
ma mère était une magicienne
elle faisait des costumes
des armures avec des pattes
des pyjamas pour chiens
Voilà : bercer le mort,
je berce le mort, facile, fidèle.
Dans le cardinal de l’homme et de la femme.
Le paysage maintenant, le paysage, voilà,
comme des langues de faim
ou des lèvres de froid ou de foule,
samedi soir une fois encore
des filles fumées jusqu’au filtre
des filles fleurs en manque de pollen
une réceptionniste deux fois une infirmière
un membre du personnel soignant et même
la médecin alors qu’elle avait les mains
j'ai passé ben du temps
au téléphone pour faire taire mes rêves
la planète était toute tendue
Tu réveilles en moi des souvenirs confus.
Je t’ai vu, n’est-ce pas? moins triste et moins modeste.
Ta tête sous l’orage avait un noble geste,
Je suis une cage d’oiseau
Une cage d’os
Avec un oiseau