Biographie
Jean-Christophe Réhel est né le 25 avril 1989 à Montréal. Il a remporté le Prix littéraire des collégiens avec son roman Ce qu’on respire sur Tatouine. Il est aussi l’auteur de cinq recueils de poésie. Son plus récent ouvrage, paru à La courte échelle, s’intitule Peigner le feu. Il publie « Le poème à Réhel » toutes les semaines dans le journal Le Devoir depuis janvier 2020. Il anime des ateliers de poésie pour tous les âges.
Entrevue
Je n’aimais pas la poésie quand j’étais à l’école. Je fuyais les poèmes comme la peste. Je ne comprenais pas et je n’avais pas envie de comprendre. J’ai eu une forme de révélation quand je me suis rendu compte que la poésie me permettait d’aller au cœur du sentiment et de l’intime.
Ce n’est que par la poésie que j’ai l’impression d’effleurer une vérité. Malgré tout, encore aujourd’hui, quand on me pose une question par rapport à la poésie, je ne sais jamais quoi répondre. Je ne sais jamais si je réponds bien à une question. Je pense toujours passer à côté de quelque chose. Les bons mots me manquent, la réponse la plus adéquate me semble toujours loin, inatteignable. Pour être honnête, je crois que mes réponses ne me satisfont jamais. Je crois aussi que c’est pour cette raison que j’écris des poèmes. Récemment, j’ai compris que la poésie, c’est un plat chaud. On laisse le plat durant des siècles sur la table et il reste chaud. Et, personne ne comprend. Pas même les poètes.
Si je tente de répondre à la question : « Comment voyez-vous le travail des poètes ? », j’ai envie d’écrire que la poésie, c’est deux oiseaux. Un dans chaque main. Pratiquez cet exercice : demain, en prenant le même chemin pour vous rendre à l’école ou au travail, arrêtez-vous deux minutes sur le trottoir. Regardez ce qui se passe autour de vous. Regardez les voitures, les piétons, les chiens et le vent dans les arbres. Écoutez ce que les gens disent autour de vous, puis fermez les yeux. Gardez les yeux fermés durant cinq secondes. C’est long cinq secondes. Ouvrez les yeux. Regardez vos pieds, vous constaterez qu’ils ne seront plus là. Ils auront quitté le trottoir, ne paniquez pas, surtout ne paniquez pas, surtout ne les suivez pas ! Continuez votre chemin sans eux, demandez un lift ou prenez deux oiseaux, ils sont là pour ça.
Il y a ce poème dans La fatigue des fruits : « des fois, j’ai fait le tour… ». Je ne me rappelle plus celui-là. Le contexte m’échappe. Je ne sais pas où j’habitais au moment de l’écrire. Dans l’appartement du haut ou du bas ? Je pense que j’habitais en haut. Je pense que c’était l’été, il faisait chaud. Je pense que j’avais de la peine. Attends, je ne sais plus. Non, je pense que je riais un peu. Je suis sûr que je riais un peu.
« Pour célébrer la terre » de Roger Dorsinville. Pour sa fulgurance et son honnêteté.