Random poem

je t’écris en retard sur la vérité

les feuilles mortes c’est le temps

qu’aura mis la noirceur pour sécher

dans l’œil percé du cœur ce corps

étranger qui nous regarde

dormir pareils aux arbres

de l’autre enfer nous forêt

surpeuplée mal grandie

aux souches injectées

de soleil et de marbre

 

sains et saufs au terme

du premier hiver le reste

de nos vies enterré creux

avec la jeunesse et la maîtrise

du feu c’est nous enracinés

les uns aux autres parmi les saints

d’une maladie ancienne qui couvons

le germe du vrai fléau c’est peu mais

je t’écris avant de ne plus savoir

pourquoi pour qui nos chaînes

 

ce qui pousse où l’air retombe

la mort dans l’arbre de tous les canifs

dans le trou creusé par la langue

ce qui parle à travers nous

par-dessus le sang les os

bien avant la prière enfoncée

dans la gorge des mourants

ce qui tombe du ciel en avance

sur la mer et la saison des feux

a l’arrière-goût terreux des rémissions

 

C’est la même douleur fraîche

que l’enfantement les mots prélevés

lentement à l’envie de vivre

la même odeur de fonds marins

enfoncée par la pluie sur le crâne

des bébés quand je t’écris

avec la peur de cent mille âmes

dans les lignes de la main

comme un évangile du rien

ou les rêves de morphine  

 

je demande grâce aux inoculés

pour les cendres et la masse de l’air

la saleté a pris le chemin des hommes

en un éclair l’ascension des lépreux

au ciel qui gouverne et la misère

grimpante par la bouche des maîtres

à ceux qui ramasseront les ailes

des oiseaux j’écrirai demain

pour les autres à la peau refermée

je prierai peut-être moins les mots

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