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un souvenir se déboutonne
soirée au resto j'avale
une crise de panique avant mes pâtes
ma sueur fait de la nappe un dessin à colorier
où je dépasse les lignes
Toi qui chante Ô Canada
Sur un territoire endeuillé
Toi qui n’entends pas les plaintes
Les cris de rage, les pleurs cachés
Qui ne sens que le vent coupant
Sur cette terre stérile
fouiller ouvrir les conserves les bocaux les boîtes de métal se gaver s’étouper fruitages fraises et rhubarbe groseilles et noisettes beurre d’érable compote de pommes gelée de roses pain perdu sucre à la crème cassonade sucer ses doigts lécher…
La faim me réclame, la faim incommensurable,
la faim excitée par le flottement continu
des étoiles. Elle vient, ma faim, empourprer
mes veines afin de dessiner le bonheur
après la tristesse. Mais le bonheur comme
au matin le même tiraillement
le même hibou momifié dans la poitrine
une soif lancinante la tenaille
ça enfle et monte
se loger dans les capillaires
dans les villosités
à la racine des cheveux
Prends la route qui mène vers l’appartement où tu es née – à ton arrivée tu remarques la porte rouge ouverte tu montes les escaliers reconnais les pièces où tu as grandi la chambre de tes commencements tes mains allègres emballent ta…
Quand je serai très vieux Demain peut-être Quand l’ange tournera discrètement la page inachevée Quand j’aurai fini de traquer les mots Défaillant d’en avoir tant mis sur la page
tu sombres
dans un lent rêve
au goût métallique
ton dos t’abandonne
tes vertèbres
une à une
s’envolent
à leur place
des biscuits chinois
j'ai mangé tous mes légumes
toutes mes émotions
j'ai rangé ma chambre
brûlé les draps
oui
j'ai bien été sage cette année
j'ai maintenant droit d'aller au carnaval
Cancer.
C'est le pire mot de tout le vocabulaire.
Un mot qu'on apprend sans le vouloir.
On se réveille un jour
Passe-partout
Tu te demandais
Nerveuse
Ce que j’allais faire à ma graduation
Pour cacher les cicatrices
Sans te rassurer toi-même
Avec l’existence
Des robes à manches longues
cette journée est beaucoup trop universelle pour moi
cette histoire me rend modeste
je ne peux pas sortir du lit dans ces conditions
je ne peux pas ouvrir les yeux dans ces conditions
sous la douche
tenir dans l’eau
tenir le vide
au cœur de quoi la détresse
la voix s’égrène
tout bas
remue quelque désordre lointain
ta détresse de quoi
tu seras seule
d'un bout à l'autre
DEPUIS QUE JE SUIS de silence.
Je plonge dans les mots
j’ai collectionné
les croyances et les médicaments
les heures de sommeil et les migraines
je suis devenue un
diagnostic
je suis devenue
officiellement folle
nous aimerions vous faire du bien
vous offrir à nos frais
une journée de rêve
voyage payé par le poème tout compris
des ortolans de l’eau turquoise
cocotiers ventilateurs
des fois j’ai fait le tour
j’ai fait le tour de l’appartement
le tour du loyer
le tour de ma job à 14 $ de l’heure
des fois j’ai fait le tour de l’amour
des fois je pleure pour rien
Je n’accède pas à la folie
qui descend sur moi
telles les langues de feu.
Les images fabuleuses
se recomposent.
Ma mère la folie s’exerce
au lieu de sortir
je m’assois
fixe le bois franc
de mes yeux gonflés
de longues minutes
mes draps sont encore tachés
de ma dernière bonne baise
les yeux fermés
je rêve
je n’arrive pas à faire
comme dans les livres arlequins
parce qu’il y avait tes chansons
qui berçaient les cadavres
tqs dans le noir
plus grands que nos corps
nous ne dormons plus
qu'à la verticale
quand la nuit se referme
sur nos peaux en état d'alarme
nous pratiquons des entailles
je t’écris en retard sur la vérité
les feuilles mortes c’est le temps
qu’aura mis la noirceur pour sécher
dans l’œil percé du cœur ce corps
étranger qui nous regarde
dormir pareils aux arbres
tu descends des bières dans un bar de la rue
mont-royal
quelques parties de billard, des copains
Je suis né un jour
où Dieu était malade
Hôpital ! hôpital au bord du canal !
Hôpital au mois de Juillet !
On y fait du feu dans la salle !
Mon âme en est triste à la fin ;
Elle est triste enfin d’être lasse,
Elle est lasse enfin d’être en vain,
Il existe pourtant des pommes et des oranges
Cézanne tenant d’une seule main
toute l’amplitude féconde de la terre
Alors que je logeais, bien humble pensionnaire,
Au numéro vingt-trois de ce quartier ancien,
J’eus longtemps — grâce au ciel moins qu’au…