Mention de source
© Prune Paycha

Biographie

Virginie Savard vit et travaille à Montréal. Iel est titulaire d’une maîtrise en études littéraires et a publié dans plusieurs revues telles que MoebiusFilles-MissilesExit et Estuaire. Son premier livre Formes subtiles de la fuite est paru en janvier 2020 chez Triptyque et son deuxième, Les deuils transparents, en août 2022 chez le même éditeur. 

Sa poésie en est une de solitude et d’intériorité où le corps est un espace étranger à explorer, marquée par l’anxiété, mais quand même (le plus possible) lumineuse. Dans ses poèmes simples et fragiles se côtoient le grand et le petit, les oracles et les antidépresseurs, les astres et les moustiques, le temps qui passe et les poils de chats.

Entrevue

Lisiez-vous de la poésie quand vous étiez à l'école ? Y a-t-il un poème en particulier dont vous vous souvenez ?

Je ne connaissais absolument pas la poésie contemporaine quand j’étais jeune. En me basant sur ce qui était mis de l’avant à l’école et ce qu’il y avait dans la bibliothèque de mes parents, j’ai lu beaucoup d’hommes blancs morts : Rimbaud, Verlaine, Baudelaire, Apollinaire, Nelligan. J’ai eu une connexion émotionnelle très forte avec Nelligan pendant longtemps. La romance du vin me touche encore beaucoup — dans son insistance à se convaincre lui-même de sa joie. La poésie que j’ai découverte était alors pour moi l’expression de la beauté et de la souffrance et cette conception influence encore beaucoup la manière dont j’écris de la poésie — loin du plaisir et de la joie. 

En secondaire 5, on devait faire un exposé oral sur l’analyse d’un poème d’un·e poète francophone. J’avais choisi Gaston Miron au hasard et j’ai découvert alors une manière plus libre d’être en poésie. La marche à l’amour m’a énormément touché et m’a donné un regard différent sur ce que pouvait dire le langage en dehors des simples métaphores aisément décortiquables. 

Quand avez-vous commencé à écrire de la poésie ? Et quand avez-vous commencé à vous considérer poète ?

J’écris depuis aussi longtemps que je me rappelle. J’écrivais de petites histoires en maternelle, ma mère les assemblait à chaque Noël dans ce qu’elle appelait Mes histoires à moi et qu’elle distribuait à mes parrain, marraine, grands-parents, etc. En vacances, je composais des poèmes qui rimaient sur les paysages et les gens qu’on rencontrait. Je les mémorisais et les transcrivais chaque soir ; ils ont été intégrés aux Histoires. À l’adolescence, comme j’écoutais beaucoup de musique, j’ai commencé à écrire des poèmes en anglais, faites pour devenir des chansons comme celles que j’écoutais. C’était un bon médium pour passer le surplus d’émotions que j’avais. Je les mettais sur mon blogue pour les partager.  

Pendant longtemps après, je n’ai pas été capable de finir un seul poème. J’étais plus consciente de la poésie contemporaine et je me sentais dépassée par la qualité, le style, la justesse de ce qui existait déjà. J’avais l’impression que tout ce que je faisais relevait du cliché. Mon trouble anxieux a pris de l’ampleur à l’université et je n’arrivais simplement plus à écrire. Le premier poème complet que j’ai écrit quand j’ai un peu repris le contrôle — j’avais commencé une thérapie avec une psy — a été publié dans Le Crachoir de Flaubert et parlait de cette impossibilité, ce vide et ce trop-plein.  

J’ai encore aujourd’hui de la difficulté à me dire poète. Je n’ai pas de routine d’écriture ou de technique. J’écris à partir de mes sentiments et de mots qui résonnent en moi, qui me touchent d’une manière particulière et je crois que ces mots ont le pouvoir de toucher d’autres gens. J’ai l’impression que les poèmes m’arrivent plus que je ne les écris.

Comment voyez-vous le « travail » des poètes ?

Le travail des poètes en est un de regard, dans la création de perspectives décalées sur le quotidien, les gens et les choses. C’est un rapport au monde qui passe par le langage. Un travail du langage musical, rythmique et émotif.  

Si vous avez un poème dans notre anthologie, qu’est-ce qui vous a inspiré lors de son écriture ?

C’est un poème que j’ai écrit en thérapie, basé sur le désir de me définir autrement que par mon trouble anxieux, en dehors de lui. Je pense que, longtemps, je me suis beaucoup évaluée en ces termes. J’avais peur que ma personnalité soit intrinsèquement liée à mon anxiété, ma dépression, et qu’aller mieux me briserait. C’est un poème qui se trouve écartelé entre le désir de guérir et celui de ne pas se perdre. 

Si vous deviez choisir un poème à mémoriser dans notre anthologie, lequel serait-ce ?

J’ai passé beaucoup de temps à réfléchir à cette question. Je suis une lectrice bien avant d’être une poète et tant de poètes dans cette anthologie ont un travail inspirant, jouissif à lire : Rose Eliceiry, Marie Uguay, Rodney Saint-Éloi, Kim Doré, etc. J’ai finalement opté pour « Nous » de Geneviève Desrosiers. C’est un texte que j’aime particulièrement dans le choix des mots, le rythme. La répétition de « Tu verras comme nous serons heureux » porte une telle charge émotive. Les poèmes de Geneviève Desrosiers, que j’ai lus pour la première fois dans un cours universitaire, ont une force brute, une charge naturelle qui me prennent au cœur. Ce poème en particulier donne un sentiment de puissance, de « malgré tout », qu’il serait intense de porter sur scène.

Publications

Titre
Les deuils transparents
Maison d'édition
Triptyque
Date
31 août 2022
Type de publication
Recueil
Titre
Formes subtiles de la fuite
Maison d'édition
Triptyque
Date
8 janvier 2020
Type de publication
Recueil
Titre
Rituels de rien
Maison d'édition
Triptyque (Poèmes)
Date
9 octobre 2024
Type de publication
Recueil
Commencez ici :